Back to MaMa ! De retour à Paris, à la frontière du XVIIIe et du IXe arrondissement. Pour trois soirées de concert non-stop. Depuis 2015, la Grosse Radio se fait un point d'honneur à être présente lors de cet événement durant lequel les pros de la profession se réunissent en conclave en journée et profitent de concerts dès l'heure de l'apéro, après avoir grignoté des petits fours et des Haribo pour des showcases. Pas une salle de concert, de théâtre, voire de récré qui n'échappe à cette déferlante, le son déborde du boulevard de Clichy, s'éparpillant façon puzzle dans moults rues parallèles. D'Anvers à la place éponyme, c'est live à go-go !
Notre vénéré Rédac-en-chef a eu l'extrême inconscience de laisser carte blanche à deux de ses gros-rédacteurs. Lesquels devraient se prendre un carton rouge des familles pour non respect de la feuille de route ! De tous les groupes qu'il avait noté comme des incontournables, pas un n'a eu leurs faveurs. Pas d'Eagle Eye Cherry, de Concrete Knives, ni de Holy Two et encore moins de MNNQNS… Et en plus, ils ont le culot de vous causer de psyche turc et de soul hollandais, d'ethnic-pop espagnol, voire de disco portugais !!! Môssieur leur chef, on a failli avoir droit à du hop-hip, alors faudrait voir à les faire rentrer dans le droit chemin du wak'n roll ces deux gonzos-là ! On vend du rêve à la sauce cheese burger, pas à la mozzarella made in CEE !!!
Zulu Zulu - La Chaufferie / La Machine du Moulin Rouge
Le MAMA Festival sait toujours comment attirer La Grosse Radio dans ses filets avec des morceaux de choix. Mercredi 17 octobre, celui-ci sentait bon la brousse. Au menu de cette première soirée festivalière ? Zulu Zulu à la Machine du Moulin Rouge. Attention, ne vous faites pas avoir comme l’équipe de la Grosse qui s’est retrouvée à l’étage en train d’écouter du Air qui aurait consommé l’intégralité de sa plaquette de Xanax. Non ! On dit non ! Il a fallu débusquer notre groupe comme la gazelle dans la savane. Direction donc la chaufferie (et pas le Central donc) avec une ambiance beaucoup plus en accord avec nos envies. Ça sent bon la bière et la fébrilité des petits concerts intimistes, tout ce qu’on aime ! Le groupe entre sur scène enfin… la horde plutôt ! Premier au front, Girafa à la guitare, xylophone et trompette (mais ça il vaut mieux ne pas en parler), Zebra à la basse et Fi-Lion à la batterie. On sent que ça va envoyer. Tous trois costumés et masqués, ils nous entrainent dans leur monde chaleureux, rythmé au possible. Parfois totalement loufoque, un peu répétitif ou brouillon, la formation remporte néanmoins la mise en intriguant.
© Photo Miguel Santos
L’Afrique est partout mais étrangement revisitée et à vrai dire pas mal dépoussiérée. Ça joue du bambou sur scène et ça finirait presque numéro un. C’est frais et terriblement joyeux ! Quand on sait, en plus, que nos trois compères : Miquel Mesquida, Miquel Perelló et Pep Toni Ferrer ont inventé la langue de leur morceau (mélange d’onomatopée) on se dit que leur avenir s’exportera bien volontiers en dehors du Masai Mara ou de l’ile de Majorque dont ils sont originaires. Et si on commence à piquer un peu du nez à la fin, un poulet (oui oui un poulet) vient nous exploser les tympans à coups de canons de confettis pour aller bouger son plumet sur scène. On se demande presque s’il n’y a pas du Rémy Gaillard là-dessous. Quand les trois zicos commencent à nous faire un pseudo « cotcot » en guise de refrain sur ce morceau étrangement rock garage, on se dit que tout va bien et qu’on adore se faire plumer.
Mathilde Normand
Moullinex - Le Central / La Machine du Moulin Rouge
Alors que nous remontons de notre jungle de sous-sol, les ventilateurs qui brassaient précédemment l'air de la scène du central, avaient cédé la place à quelque chose de beaucoup plus groovy-baby… Renseignements pris auprès du programme (obligeamment fourni avec le magnifique tour-de-cou agrémenté d'un pass VIP avec lequel on adooore frimer), il s'agissait d'une performance audiovisuelle. Tout s'explique… Tanqués derrière la console du sondier - ou du lighteux, on arrive jamais à savoir avec tous ces boutons qu'ils font mine l'un comme l'autre de pousser au bon moment pour déclencher l'effet-qui-va-bien - on s'accoude aux barrières qui le protègent de la populace. Ça se bousculerait presque pour ce set de Moullinex. On a beau être loin de la scène, les teintes flashy du costume du chanteur nous sautent à la figure. Son déhanché aussi. Si on était la réincarnation de Freddie Mercury (pas la peine de mettre en gras, c'est juste une special dedicace au boss pour se faire pardonner), on en aurait presque nos vapeurs…
© Photo Miguel Santos
C'est que Luis Clara Gomes, aka Moullinex, ne fait pas spécialement dans la demi-teinte. Son dernier opus, tout juste sorti de son fourneau de DJ multi-instrumentiste, s'intitule Hypersex. C'est ce qui s'appelle annoncer la couleur ! Casquette et tenue sombre, l'homme demeure discret sur scène, alternant guitare et clavier. Il préfère sans doute laisser la vedette à son chanteur. Quand ce dernier, parti se changer en coulisses, revient vêtu d'une combi body, d'une cape rougeoyante et entame un "Love love" ponctué de rassurants "don't be afraid", la température monte d'un cran. Devant moi, une frénésie sensuelle à peine contenue s'empare d'une blonde à la quarantaine finissante. Il faut avouer que le groove de Moullinex est effectivement contagieux. On tape gentiment le rythme en cadence sur notre barrière métallique et on parvient sans peine à reprendre en choeur "Heartbreaker to the undertaker !". Qu'importe le texte pourvu qu'on ait l'ivresse et qu'on move du boule !
Denis Madelaine
Altin Gün - Backstage by the Mills
Pas de Holy Two au Carmen comme requis par le N+1. Plutôt une pause-panse dans un p'tit resto de la rue Lepic. Déjà qu'on se gratte pour les notes de frais, on va quand même pas se contenter d'un panini debout sur le pouce ! On fera du non-stop concerts quand la direction nous dotera d'une carte de visite de pro avec le logo-qui-va-bien (une revendication datant du MaMa 2016 et tombée à la trappe depuis…). Lorsque l'on arrive au Backstage, Léonie Pernet termine son set. Deux brunes qu'on a pas l'air de compter pour des prunes, avec du chien, et en le faisant exprès qui plus est. Même si ce n'est pas trop notre tasse de thé, faut admettre qu'elles ont quelque chose. On avoue sans peine que notre cœur s'emballe plutôt pour Merve Dasdemir la blonde chanteuse de Altin Gün, occupée avec ses quatre complices par le changement de plateau. Qu'on ne s'y trompe pas, c'est bien le son rock psyché du groupe turco-néerlandais qui nous a conquis en février dernier lors des Nuits de l'Alligator et qui nous a convaincu de nous taper un concert à plus de minuit…
Photo D. Madelaine
On se sent un peu frustré à la vue de la setlist coincée sous les pieds du clavier. Quelques titres sont biffés, nous aurons donc droit à un set un peu restreint. La pléthorique programmation du MaMa impose un rythme très serré et a surtout pour objectif de présenter des artistes aux pros et à donner envie au public de les revoir plus longuement. Mais on mesure la chance de voir des groupes dans de telles conditions. Installé au bord de l'alcôve qui jouxte la scène, on pourrait presque toucher le bassiste Jasper Verhulst, littéralement habité par le groove de son instrument. L'initiateur de Altin Gün est pour beaucoup dans la dominante psyché du groupe et son jeu limite funk fait mouche d'entrée auprès du public. Ben Rider n'est pas en reste à la guitare et Nic Mauskovic, épaulé par le percussionniste Gino Groeneveld soutient sans problème le rythme. Mais le son Altin Gün ne serait pas ce qu'il est sans la performance inspirée de Erdinc Yildiz Ecevit, tant au sax qu'aux claviers. Merve Dasdemir et lui se partagent le chant, donnant deux couleurs différentes autant que complémentaires aux mélodies. Nous aurons d'ailleurs droit ce soir à de nouveaux morceaux et aux inévitables hommages aux artistes de la la scène turque des années 1970. Altin Gün, le mix réussi entre inspiration orientale et psyché, entre revival et modernité.
Denis Madelaine