Ça bouge du côté des Limiñanas. Après avoir écumé les festivals estivaux, les catalans nous reviennent avec un nouvel opus I’ve Got Trouble In Mind Vol.2. Nouvel album pas vraiment, plutôt une compilation qui revisite les différentes périodes du groupe depuis le passage sur le label Because, le premier volume se chargeant de compiler les premiers albums sortis sur les labels américains.
Après presque dix ans d’existence, le groupe nous livre ici plus qu'une simple compilation. Ce deuxième volume I've Got Trouble In Mind rassemble des inédits, des faces B de singles et des reprises que les Limiñanas affectionnent jouer « live » en rendant hommage à des groupes qui les ont inspirés.
Il nous permet aussi de croiser les différents artistes qui ont collaborés avec le duo catalan. Bien sûr, Pascal Comelade, lui aussi signé sur le label Because, occupe une part importante tant son influence sur le groupe est prépondérante. On aura donc droit pour commencer à une version live de "The Train Creep A-Loopin". Un riff de basse façon générique de série TV de super-héros sixties nous accueille avant de monter en puissance durant les cinq minutes trente qui composent le morceau. Pas étonnant qu’en concert ce titre soit exploité et envoie de véritables électrochocs à un public qui en redemande. "Lord of Flashington" est un titre bonus instrumental de la version CD du Traité de Guitarres Triolectiques à l’Usage des Portugaises Ensabléees de 2015, un album commun avec Pascal Comelade. Il figure aussi sur la version LP américaine The Nothing Twist sortie sur le label Trouble In Mind en 2016.
Pour finir avec Pascal Comelade, une rareté exhumée de l’année dernière en période de Noël. Deux titres sortis sur le label Snowflakes Christmas Singles Club. Le premier morceau "Curse Of Santa Claus" est une nouvelle composition qui revisite Noël façon fuzz. La version de "Silent Night" tire aussi son épingle du jeu tant fuzz et xylophone se marient bien lorsqu’ils sont accompagnés par des vents qui rajoutent un coté fiesta sud américaine. Et puisqu’on cause Noël, on se souviendra aussi que le combo a livré un excellent "Christmas" il y a quelques années qui n’a rien à envier a celui de Darlene Love produit par Phil Spector.
Autre personnage important dans la carrière des Limiñanas, l’ami Peter Hook, bassiste de Joy Division et New Order. La carte de visite du monsieur est longue. On retrouve ici "The Gift", titre phare de l’album Shadow People, deuxième collaboration avec Peter, après "Garden Of Love". Un titre totalement dans l’esprit du travail de Peter Hook.
Les Limiñanas assument fièrement leurs origines catalanes et c’est fort logiquement qu’ils se sont rapprochés du dernier disquaire indépendant perpignanais et de son label Cougouyou Music. On trouvera donc sur cet album, "The Inventor" et "The Woods", deux titres sortis sur label de Markus Detmer. "The Inventor" est un morceau bien psychédélique mais qui garde un coté pop comme cela se retrouve très souvent dans l’œuvre des perpignanais. On y notera l’affection des Limiñanas pour les instruments à cordes orientaux. "The Woods" s’inscrit ans la même veine en rajoutant ici une voix envoutante.
On ne peut parler des personnages influents dans le giron Limiñanas sans évoquer Emmanuelle Seigner. Les habitués des réseaux sociaux auront déjà vu et écouté les démos publiées par Anton Newcombe sous le nom de L’Epée. Mais ça se sera une autre histoire.
Autre aspect de la musique du combo, le penchant pour le cinéma des années 60, pour Ennio Morricone. Pour illustrer cela, "Maria’s Theme", une chute de l’album Malamore, face B du single "Garden Of Love" nous montre le penchant assumé du duo catalans pour les titres instrumentaux ainsi que sa passion pour la musique de film italienne. Ce "Maria’s Theme"» pourrait figurer en bonne place dans des westerns comme Le Bon La Brute et Le Truand. On l’imagine bien à la place de "Ecstasy Of Gold" dans la scène finale du cimetière. Cet "Ecstasy Of Gold" a été très longtemps utilisé en intro des concerts de Metallica. Les deux combos partageraient-ils une passion commune ?
"Nuit Fantôme" est tiré de la face B du maxi Istanbul Is Sleepy annonçant l’album Shadow People. Ce morceau qui rappellera "El Beach" à ceux qui ont déjà usé les sillons de Malamore, le précédent opus du groupe. La voix de Lionel fait vraiment des merveilles pour donner une atmosphère particulière. Les textes sont inspirés et racontent des histoires pleines de poésie que la musique des Limiñanas sublime. Les chœurs et la guitare fuzz donnent du relief au morceau. On y sent aussi la passion des Limiñanas pour les films des sixties. On imagine facilement ce "Nuit Fantôme" pour illustrer un Godard ou un Fellini. »
Maintenant, attaquons-nous aux reprises. Parmi celles-ci, on notera "Two Sisters". Avec leur copain Anton Newcombe, ils s’attaquent au titre des Kinks et font perdurer le formidable esprit psyché des anglais drivés par les frères Davies. "Two Sisters" était au départ un titre offert pour une compil du magazine Mojo sur lesdits Kinks et on l'a recroisé sur un 45t pour le Records Store Day 2018.
On y trouvera aussi la reprise de Echo And The Bunnymen "Angels And Devils" (face B du maxi Istanbul Is Sleepy). « Les voix sont magnifiques et rappellent les compos sixties anglaises (bien que le titre soit de 1984). On en profite pour souhaiter au passage la bienvenue à Renaud Picard (Hair And The Iotas, The Llamps), venu renforcer les rangs des Limiñanas. Son timbre de voix si "beatlesien" interagit à merveille avec la voix chaude de Nika sur les chœurs.
Dans un esprit très sixties, le "Time Will Tell" de Polnareff et Keith Reed (compositeur du "Whiter Shade Of Pale" des Procol Harum) en 1968 fera merveille avec la voix de Nika mise en orbite par la "fuzz" de Lionel. Un clavier lysergique rappellera les premières productions de Lionel avec son groupe Les Gardiens du Canigou.
Également au menu, "Russian Roulette" cover de Lords Of The New Church que les habitués des concerts du combo commencent à très bien connaitre. Chaque fois, un "highlight" du concert, ce titre sublimé par la patte du duo de Cabestany a enfin les honneurs de la gravure vinyle et prend des allures de premier single du groupe.
Rayon nouveautés, on trouvera cet ovni musical qu’est "La Cavalerie". Jamais entendu auparavant, cette reprise de Julien Clerc se trouve être beaucoup plus digeste que l’originale, agrémentée de sauce "fuzz".
On s'étonnera de ne pas croiser ici, une reprise du "Gloria" des Them qui dépote depuis que le groupe tourne pour promouvoir l'album Shadow People. Si un I've Got Trouble In Mind Volume 3, devait voir le jour, elle pourrait y figurer en bonne place tant l'énergie qu'y met le groupe est puissante et que le message passe bien avec le public.
Au final, les Limiñanas nous offrent ici avec ce I’ve Got Touble In Mind Volume 2 bien plus qu’un best of mais une véritable compilation de morceaux rares, variés, qui permettent un approche globale de la musique du groupe depuis le passage sur le label Because. Un album qui peut donc être apprécié par les nouveaux fans qui souhaitent découvrir le groupe mais qui ravira aussi les collectionneurs completistes du groupe et qui possèdent déjà une grande partie de la discographie.
Et n"oublions pas que le groupe est toujours sur la route. Voici les dates françaises (et allemandes, suisse et luxembourgeoise) à venir ci-dessous...
Et pour 2019, une visite en Perfide Albion est déjà programmée...
Sortie LP et CD "I've Got Trouble in Mind vol.2" le 16 novembre 2018 sur le label Because Music