The Tangent – Proxy


Le temps passe et The Tangent est toujours là, 15 ans après sa création. Le groupe continue son bonhomme de chemin et nous livre son onzième album intitulé Proxy. En anglais, "proxy" veut dire "par procuration". Ca tombe bien, on vous propose d'écouter par procuration ce nouvel album, déjà sorti chez Inside Out.

The Tangent a toujours eu une place un peu particulière dans le monde du rock progressif. Un des rares groupes actuels à délaisser le prog old school de Genesis et ELP pour aller voir d'autres horizons. Et ce n'est pas ce nouvel album qui va dire le contraire. Les influences sont multiples avec notamment le morceau "The Melting Andalusian Skies" qui, comme son nom l'indique, lorgne du côté de l'Espagne avec un côté flamenco. On part également vers des rythmes latinos, bossa nova et même du côté du monde arabe. On a toute la culture hispanique qui en prend un coup en quelques minutes. Et comme si ça ne suffisait pas, quelques notes de sitar vous amèneront dans des contrées plus épicées.

Le tour des genres ne s'arrête pas là : "A Case of Misplaced Optimism" est un trip funky et hip hop old school. Stevie Wonder et Jamiroquai ne sont pas loin. Et que dire de cet ovni intitulé "The Adulthood Lie", la pièce maîtresse de cet album. Le morceau vous emmène pendant 16 minutes sur la planète nu-disco genre "Murder on the Dancefloor" de Sofia Ellis Bextor. Il faut dire qu'Andy Tillison n'a jamais renié sa période DJ, qu'on pouvait déjà entendre sur l'album The Slow Rust of Forgotten Machinery. Mais là, on ne va pas vous mentir, c'est très déroutant de se retrouver avec un morceau du genre "Spacer" de Sheila avec un solo d'orgue que les fans de Deep Purple adoreront, pour ensuite aller dans du free jazz, du drum n' bass en repassant par du rock progressif des années 70's à la Genesis. Dur à digérer mais tellement rafraichissant pour un genre qui, au départ a voulu dépoussiérer le rock et qui a fini par tourner un peu à l'auto-plagiat.

Puisqu'on est dans l'univers dance/techno, parlons du dernier morceau "Excerpt from "Exo-Oceans", un titre ambiant electro, qui fait penser à une descente après un trip. On se croirait dans un club lounge avec des sons chamaniques et un piano qui hante et qui domine des arpèges électro. Seul problème, la guitare a totalement disparue, ce qui est un peu étrange pour un groupe de rock. On comprend mieux pourquoi ce morceau a été relégué à la fin : faire redescendre l'auditeur après un voyage épique.

Pas d'inquiétude, car même si les mots hip hop, bossa nova et disco ont été prononcés, on a bien à faire à un vrai album de rock progressif dans la plus pure tradition. Et The Tangent le montre très clairement dès le premier morceau intitulé sobrement "Proxy". 16 minutes de rock progressif old school qui lorgne vers le jazz et qui démarre par une longue introduction un peu improvisée. C'est peu digeste pour les néophytes mais les habitués du genre seront en terrain conquis. Le morceau permet d'entrée de jeu de retrouver des éléments chers à The Tangent : une batterie jazz tout en douceur avec un jeu à la charley sublime, une basse qui groove ou encore des claviers chauds tels que l'orgue Hammond et le piano électrique. Là où ce morceau qui peut paraître classique tire son épingle du jeu, c'est par l'ajout d'instruments plus inédits tels que la harpe, la flûte ou les cuivres. Les personnes peu habituées à ces ambiances jazzy, improvisées et quelque peu désorganisées au premier abord, pourront toujours se raccrocher à un refrain assez accrocheur.

Autre morceau classique, "Supper's Off" fait directement penser à Genesis. Rien que le titre évoque "Supper"s Ready", chanson emblématique du groupe de Phil Collins et Peter Gabriel. The Tangent ne verse pas dans le plagiat en intégrant intelligemment à son style des notes de bossa nova et de jazz. Cependant on retrouve quand même les caractéristiques qui ont fait les grandes heures du groupe anglais : le style harmonique et l'orgue de Tony Banks et une voix parlée proche de Peter Gabriel.

La voix d'Andy Tillison est d'ailleurs un des grands intérêts de l'album. Dans le rock progressif, il arrive souvent que le chant passe après les longues instrumentales. Cependant, Andy arrive à varier son répertoire, passant d'une voix dictée à la Lou Reed dans "The Adulthood Lie" à la voix plus crooner de Tom Jones et Joe Cocker dans "A Case of Misplaced Optimism". Pas d'inquiétude, Andy chante aussi ! Sa voix prend des airs de Ian Anderson du groupe Yes, de Roine Stolt (qui a, par le passé, contribué à The Tangent) ou encore des intonations à la Mark Knopfler.
On regrettera qu'Andy peine un peu dans les aigus et ait souvent recours à une voix parlée. Un choix pour mieux déclamer ses paroles contestataires ?

Qu'on se le dise, The Tangent est un groupe engagé. Les habitués du groupe ont encore en tête le surprenant "A Few Steps Down the Wrong Road" de l'album The Slow Rust of Forgotten Machinery, morceau qui montrait le côté punk et ultra politique d'Andy Tillison. Sur "Proxy", le côté prise de positions est là mais laisse place parfois à une réflexion douce amère sur le passé et les occasions manquées. On reste quand même loin des paroles décrivant des mondes spatiaux et fantastiques, si chères aux groupes de prog.

Proxy est donc un album surprenant, quelque peu déroutant au premier abord mais qui évite les répétitions et invite au voyage. Rien que pour la surprise monumentale "The Adulthood Lie", cet album vaut le détour mais d'autres morceaux seront couper l'auditeur du monde qui l'entoure pour l'emmener vers d'autres pays et d'autres styles musicaux.

Sortie le 16 novembre chez Inside Out.
 

NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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