Ahhh, Neal Morse. Dans le milieu du rock progressif il n'est pas simple de trouver musicien plus prolifique, en atteste la longueur de sa carrière solo, associée aux supergroupes dans lesquels il occupe une position centrale (Transatlantic, Flying Colors) et le Neal Morse Band. C'est lui qui est à l'honneur aujourd'hui, avec The Great Adventure, la deuxième partie consacrée au roman The Pilgrim's Progress. Un nouveau double album concept proposant son lot de titres forts et que l'on devrait sans mal conseiller à tout amateur de rock progressif.
Un peu plus de deux ans après The Similitude Of A Dream, le Neal Morse Band est de retour avec un nouvel opus progressif et épique. Au premier coup d’oeil, la parenté semble évidente : l’artwork de l’album recycle exactement la même police et les mêmes codes avec son effet couverture de livre, tandis que sur le plan des compositions on retrouve un double album en deux mouvements principaux (le tout divisé en cinq chapitres). Celui-ci s’appuie de nouveau sur le roman allégorique chrétien The Pilgrim’s Progress, écrit par John Bunyan au XVIIe siècle. Alors simple suite, redite de The Similitude Of A Dream, ou grand album de rock progressif ? C’est ce que nous allons voir.
Difficile de nier le talent de composition du père Morse. Les années passent, et à l’exception de la majorité de ses albums solos de rock religieux chrétien, ses compositions sont toujours de haute volée; The Great Adventure le prouve une nouvelle fois dès le début musical d'“Ouverture”, une fois passé le texte d’introduction. Alors bien sûr, les envolées au piano ponctuant la rythmique assénée par Mike Portnoy sur ses fûts ne constituent en effet rien de nouveau pour quiconque suivant la carrière prolifique de Neal, mais quelle grandiloquence et quelle efficacité ! On n’en aurait pas douté en jetant un oeil à la composition du Neal Morse Band, toujours formé du même groupe de techniciens : aux côtés de Mike et Neal on retrouve Eric Gillette aux guitares, Randy George avec sa basse bien ronde et Bill Hubauer derrière les claviers, tous (à l’exception de Randy) assurant une partie du chant.
Car à l’instar de The Similitude Of A Dream, l’album concept raconte une histoire, une quête initiatique dans laquelle chaque intervention de protagoniste est incarné par un membre, et donc par une voix. Si l’essentiel des prestations vocales restent assurées par Neal, la part importante accordée à Bill risquera de déranger ceux qui ont du mal avec sa voix plutôt nasillarde (“Welcome To The World”, “A Momentary Change”). En revanche, les parties vocales de Mike restent assez limitées, en dehors des choeurs monstrueusement efficaces habituels aux compositions du groupe - et de façon générale, globalement de tout ce que touche Neal.
La découpe de l’album en chapitres s’appuie sur plusieurs thèmes forts, introduits une première fois, retrouvés pour un développement épique, puis enfin dans un dernier mouvement de conclusion : “Welcome To The World” est ainsi magnifié dans “To The River”, puis rappelé avec adresse lors de “A Love That Never Dies”, tandis que “A Momentary Change” se rappelle lui durant “I Got To Run” et “Freedom Calling”. Cette récurrence des thèmes donne une grosse cohésion à The Great Adventure, qu’on écoute aisément d’une traite malgré la longueur inévitable du format (un peu plus d’1h40), mais elle n’aide en revanche pas vraiment à créer de moments très forts. Quelques fulgurances jouissives sont tout de même présentes, notamment un “Venture In Black” délicieusement malsain, crade et poisseux, qui devrait être du meilleur effet en live. Mais il faut reconnaitre dans l’ensemble que plusieurs retours de thèmes sont un peu téléphonés et trop prévisibles, notamment dans les titres développés sur le deuxième album, proposant au final peu de surprises sorti de l’enjoué “Vanity Fair”.
Dans la droite lignée de The Similitude Of A Dream, qui déjà s’appuyait sur The Pilgrim’s Progress pour délivrer un double album ambitieux, le Neal Morse Band signe avec The Great Adventure une nouvelle copie très propre et largement recommandable, sans atteindre non plus des sommets créatifs. On tient là un très bon album de rock progressif, que la formation va sûrement défendre d’une fort belle manière lors de son passage en France cette année.
Sortie le 25 janvier chez Radiant Records.
Tracklist acte 1: Overture | Tracklist acte 2: Overture 2 |