Merzhin. Nomades, 7ème album pour les Bretons. Toujours plus sombre, plus Rock. En plein démarrage d'une tournée longue et prometteuse, Pierre (chant) et Jean-Christophe (Batterie) nous ont accordé un entretien. Récit.
Le dernier album en date, Nomades, est sorti il y a quelques temps maintenant.
Quels sont les retours?
Pierre: Très bons! On n'a as eu de mauvaise chronique à ce jour.
Jean-Christophe : Tout le monde nous dit que c'est un des meilleurs, voire le meilleur. Album plus rock, mais même les fans de la première heure adhèrent.
Pierre: Ca nous fait plaisir. On en est nous-mêmes très satisfaits.On a essayé de trouver un juste milieu entre les instruments à vent et les guitares, le côté plus rock du groupe. C'est toujours difficile. On a pas mal expérimenté ces dernières années, et on est revenu sur les essentiels, la bombarde et la flûte. On a trouvé une bonne alchimie entre les deux, et on a mis un son plus brutal, avec des guitares qui correspondent plus à ce qu'on faisait sur scène.
Jean-Christophe: C'est un album plus brut, taillé pour la scène. D'ailleurs on a enregistré live, guitare, basse et batterie ensemble, ce qu'on n'avait pas fait depuis longtemps. C'est l'énergie qu'on peut capter en live qu'on retrouve dans cet album.
Et beaucoup plus noir aussi! Quelle évolution, même au niveau des visuels, entre les couleurs vives des Nains de jardin et le presque noir et blanc de Babel, jusqu'à ce noir et blanc complet de Nomades. C'est noir, noir, noir?
Pierre: On s'adapte ! Et puis, c'est aussi comme ça qu'on conçoit le rock. Le rock se doit de dire des choses. On s'inscrit dans la veine des groupes qu'on aime, Noir Désir, No One Is Innocent... On conçoit la musique pas uniquement comme un divertissement. Ce qu'on vit, ce qu'on voit, le fait qu'on soit pères de famille... Tout ça nous incite à nous poser des questions, à faire un état des lieux. C'est vrai que ce n'est pas très joyeux. J'aimerai bien écrire plus joyeusement, mais c'est pas gagné.
L'histoire de Merzhin dure depuis 22 ans, avec une composition de groupe très stable, quasiment la formation d'origine. Comment fait-on pour vivre aussi longtemps dans le même camion?
On a grandi ensemble. La musique est devenue notre métier, on continue à travailler ensemble. On se connaît depuis le collège. Il y a un profond respect. C'est une aventure humaine. Et puis on avance en même temps. On a appris la musique en même temps, on a la même conception, la même trajectoire. On travaille à l'unanimité, ce qui évite les égos. C'est un vrai fonctionnement de groupe.
Jean-Christophe: Il n'y a pas de leader. On est six, et chacun a le droit de parole. C'est pour ça que ça marche. On est un groupe démocratique!
Vous avez signé chez Verycords, gros label rock. Ca a changé quelque chose?
Pierre: Ça nous a déjà apporté les moyens. Depuis 2010 on faisait tout nous-mêmes, on avait notre propre label, Adrénaline Prod. C'était structuré, on a notre propre studio, on connaît bien le métier. On est passé par les maisons de disques, sur un label indé géré par des amis. Mais on s'était recentré sur nous-même, parce que on y avait perdu le côté humain de la musique. On ne s'y retrouvait plus.
Mais ça a ses limites aussi, parce qu'au final on ne faisait plus de musique. On devait gérer un label, les promos, les tournées... Avec Verycords, on a trouvé un label qui met l'artiste au coeur du projet.
Jean-Christophe: On a retrouvé notre liberté. Ca pourrait sembler contradictoire, parce qu'on a signé sur un label. Mais en fait on n'a que notre musique à penser. Mehdi (El Jaï, patron de Verycords, NDLR) nous a donné carte blanche pour l'album, nous a donné les moyens d'aller dans un beau studio, avec un producteur qui travaille avec No One Is Innocent, et c'est comme ça qu'est arrivé Kemar dans l'aventure d'ailleurs.
Pierre: Clairement, on n'aurait pas pu avoir ce son. Ca nous a fait passer un étape.
Jean-Christophe: Ça fait quelques temps qu'on y pense. On s'est raté de quelques mois avec Verycords pour Babel. Ca a commencé avec le live qui est sorti juste après.
Kemar et Shanka de No One Is Innocent ont participé à l'album. Comment ça s'est passé?
Pierre: Très simplement. On pensait que "Nomades", le titre avec Kemar, allait lui parler. On lui a envoyé, il nous a tout de suite dit oui pour le morceau et pour le clip. On a commencé à discuter, même si on se connaissait déjà, ça nous a permis de réellement échanger, comprendre la démarche de chaque groupe. Et le producteur a pensé à Shanka pour certains morceaux. Il lui a demandé, Shanka a également accepté. Il a fait des guitares sur quatre morceaux, il a amené son son à lui. Et ça va continuer, on a des dates communes, des plateaux communs...
Il y a beaucoup d'instruments bretons sur cet album, flûte, bombarde, caisse claire... Mais le résultat n'est pas de la musique bretonne.
Jean-Christophe: C'était le but, que ça sonne très rock, tout en utilisant des instruments traditionnels. Mais on ne les utilise pas comme dans la musique bretonne. La bombarde, par exemple, l'instrument des bagads par excellence, est utilisé en même temps que les solos de guitare.
Pierre: On essaye d'avoir une utilisation différente, de faire comme des riffs de guitare. C'est le son qui nous intéresse. C'est un son puissant, qui se marie bien avec les guitares. Et puis, c'est l'instrument de base du groupe. Même si on a dérivé vers d'autres choses, des trompettes, des saxophones... Mais la bombarde est vraiment liée au son, à l'identité du groupe.
Il n'y a pas de risque de schyzophrénie, de garder ses racines avec la bombarde par exemple, et de s'en éloigner autant en même temps? Le public ne se perd pas?
Jean-Christophe: En fait, sur scène, Merzhin a toujours été rock. Depuis le début de la tournée, les gens ne sont pas déçus. Et ils vienent pour écouter le dernier album, pas les anciens. Ce n'est pas non plus un virage brutal, on a commencé depuis 2006 je crois, le troisième album.
Pierre: Les premiers albums ont eu un gros succès. Les gens achetaient les albums, ça passait en radio... Tout de suite, ça te marque un groupe! Mais on joue la musique qui nous fait plaisir. C'est dans une logique d'évolution. On aurait pu continuer à faire ce qu'on faisait au début, mais très vite on s'en serait lassé. Ca ne nous aurait pas convaincu nous-mêmes... Alors on cherche, on cherche, on continue d'avancer!
Merzhin est actuellement en tournée.
Toutes les dates sur le site web et sur la page Facebook du groupe.
Photos Rodolphe Goupil. Reproduction interdite sans l'accord du photographe.