C'est du côté de Genève qu'on va chercher ce One Rusty Band. Le duo est composé de Rusty Greg aux voix, guitares, foot drums et autres harmonicas accompagné de Léa créditée au washboard et rhythm’n’foot. La dame assure la partie spectacle avec ses rythmiques aux claquettes. Plus parlant en live que sur disque. Mais voyons comment ces deux trublions ont réussi à retranscrire sur vinyle leur concept musical.
Dès l’intro, on sent le blues root mais trash comme on l’aime ! Ca slide, c’est distordu, lo-fi… On aime cette belle entrée en matière. Ca laisse présager des meilleurs augures. Une sirène en arrière-plan apporte le côté urgent. Nous voilà prêts à nous lancer dans ce Voodoo Queen.
Allez, une petite virée vers la cave du diable. "Devil Cave" ! One Rusty Band rajoute des vocaux. Une voix plus actuelle que celles auxquelles les pionniers du blues trash nous ont habitué. Un coté plus boogie rock s’en dégage toujours soutenu par des parties de slide saturées du plus bel effet.
Un peu plus loin, on flirtera encore avec Lucifer. "I’ve Got The Devil" démarre comme un vieux blues puis le titre flirte avec des choses plus actuelles. Du bon rock très facile d’accès. Oui, One Rusty Band ne réinvente pas le rock mais est-ce que AC/DC a inventé quelque chose ? On s’en fout tant que l’écoute est agréable, non ?
Et ces titres comme "Poor Boy Blues" qui empruntent clairement à l’écurie Fat Possum ? Junior Kimbrough et R.L. Burnside ou encore T. Model Ford seraient fiers de cette nouvelle génération de bluesmen représentée ici par One Rusty Band. Ca respire le delta et quand l’harmonica s’en mêle on pense à Little Walter. Classe.
Des titres comme "Magic Potion" démarrent plutôt vite pour du blues. C’est du bon gros rock mâtiné de musique du diable. Quelque "licks" bien sentis à la gratte donnent tout leur sens aux morceaux. On se rapproche parfois des premiers ZZ Top pour le côté boogie. Pas étonnant que sur le titre "Boogie Woogie", on repense aux Texans barbus ! Un riff accrocheur façon "La Grange" et le tour est joué. Un très joli son de guitare et One Rusty Band nous emporte.
"Under The Moon" part fort avec un riff de boogie blues survitaminé. Une rythmique martiale pour emmener tout ça ! Et n’oublions pas que One Rusty Band est l’affaire de deux personnes seulement ! Pourtant ils font plus de barouf qu'un quintette !
On trouve aussi sur ce Voodoo Queen des ambiances un peu plus pesantes comme avec "Sex Blood ‘n’ Rock ‘n’ Roll". Un petit côté Screaming Jay Hawkins s'en dégage avec les rires en arrière-plan. Une ambiance Voodoo s’installe. Mais avec le titre de l’album on était prévenu, non ? En plus la voix féminine rajoute un côté musique de films d'horreur pas déplaisant du tout. Joli coup, One Rusty Band!
On reste dans le trip instrumental qui aurait pu séduire Tarantino avec "Spanish Desert". One Rusty Band rajoute une touche de surf façon "Malaguena" à la manière des Phantom Surfers ou de Dick Dale a ses grandes heures. Un instant de fraicheur dans ce monde de blues trash.
"I’m Lost" se pose une peu comme une ballade blues. Ces titres auraient certainement bien plus à Ben Vaughn. On pense à son album Desert Sessions sorti chez Kizmiaz il y a quelques années.
"Voodoo Queen", titre éponyme a de forts relents de hard rock. Un riff pêchu façon Ty Segall avec Fuzz. "Voodoo Queen" a de la gueule. Un mélange d’Aerosmith et de Muddy Waters. Ca rappelle les productions de Mothra Slapping Orchestra surtout au niveau des voix.
En tout cas, avec ce Voodoo Queen, One Rusty Band se pose en figure de proue du blues revival des années 2020. A ranger aux coté des types comme Bror Gunnar Jansson qui lui aussi sort un nouvel album. Les bases du blues du delta sont analysées et réagrementées sauce XXIème siècle pour notre plus grand plaisir et on adhère pleinement à la musique de ce One Rusty Band qu'il nous semble urgent d'aller voir live pour profiter pleinement du duo.
Voodoo Queen est sorti le 20 septembre 2019