A l’occasion de leur concert au Badaboom de Paris, dans le cadre des Deezer Live Sessions, nous avons pu rencontrer Kieran Shudall et Sam Rourke, respectivement chanteur et bassiste du groupe Circa Waves. Nouvel album, projets futurs, thèmes abordés dans les chansons… Les deux musiciens se sont livrés à La Grosse Radio.
La dernière fois que vous étiez à Paris, vous avez ouvert pour Two Doors Cinema Club à l'Olympia. Comment c’était ?
Kieran Shudall : C'était il n'y a pas très longtemps ! C'était un endroit charmant, comme un grand et beau théâtre.
Sam Rourke : C'est un lieu incroyable avec de grandes enseignes en néon à l'extérieur !
Kieran : Oui, c'était vraiment cool.
Sam : Mais la meilleure chose, c'était après le concert. C'est embarrassant pour Kieran mais il a acheté des pizzas pour tout le monde !
Kieran : Oui, j'ai acheté des pizzas ! Sam a dit : "Tu es l'une des meilleures personnes que j'ai jamais connues !»
Sam : Et tu es un chanteur fantastique !
Êtes-vous excités de jouer ce soir dans un lieu aussi intime ?
Kieran : Oui, on n'a jamais joué ici avant, mais c'est vraiment cool. Cela me rappelle beaucoup les salles anglaises. Ça sent comme dans les salles anglaises.
Sam : J'allais dire la même chose. Il y a une bonne odeur de salle de concert quand tu viens ici.
Kieran : Ca sent l'eau de javel !
La première moitié de votre double album Sad Happy est sortie le mois dernier. Êtes-vous satisfait de l'accueil qu’elle a reçu de la part des médias et des fans ?
Kieran : Je suis très heureux.
Sam : C'est toujours bizarre parce que l’album a été enregistré il y a des mois et des mois. C'est bizarre, je me sens plus mal à l'aise qu'heureux !
Votre précédent album est sorti l'année dernière, pourquoi avez-vous décidé d'enregistrer un nouvel album aussi rapidement ?
Kieran : J'ai appris que j'allais avoir un bébé en septembre. Nous avions donc du dernier album à septembre pour écrire et enregistrer un album. On s'est dit : «Allez, on le fait !». Je pense que nous travaillons très bien sous pression, on doit enregistrer un album entre deux festivals et faire des allers-retours. Mais j'aime bien travailler sous pression comme ça. J'aime ça, si tu as trop de temps, tu te lèves et tu fais autre chose.
Sam : Je vais te rappeler que tu as dit ça un jour ! Je te dirai : "Je pensais qu'en fait tu aimais la pression !" haha
Kieran : Je suis toujours sous pression, alors je ne sais pas ce que c'est que de ne pas avoir de pression !
De qui parle la chanson "Jacqueline" ?
Kieran : C'est ma cousine ! Elle a eu un enfant et je l'ai vue à une fête de famille. Elle était vraiment insomniaque. Elle était surmenée en tant que nouvelle mère. C'était un choc de la voir, elle était vraiment en train de s'effondrer. On ne se rend pas compte à quel point cela peut être difficile avant de voir une personne comme ça. J'ai donc voulu lui écrire une chanson.
Crédits photo : Florentine Pautet
D’ailleurs, est-ce difficile d'être dans un groupe et d'avoir un bébé en même temps ?
Kieran : Vraiment difficile. C'est comme si tu laissais derrière toi une partie de toi-même. C'est étrange, je me sens vraiment protecteur envers lui. Quand je le quitte, j'ai juste l'impression de ne plus le protéger. Je me sens comme un aimant ! Je n'ai jamais vécu cela auparavant.
Sam : C'est bizarre, un aimant.
Kieran : C'est purement un truc d'animal. C'est intéressant.
Qui a donné l'idée de faire un album en 2 parties ?
Kieran : Nous ne voulions pas le faire en deux parties pendant l'enregistrement et l'écriture. Nous avons commencé à voir que certaines chansons correspondaient à un schéma. Et après cela, nous avons commencé à parler de l'idée de sortir deux parties séparément. Nous ne l'avons jamais fait, mais cela avait du sens. Tout est venu des chansons en fait.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le processus d'enregistrement et d'écriture ?
Kieran : Nous avons d'abord eu les structures et les chansons, et nous avons aussi fait beaucoup de production, donc nous allions en studio juste pour enregistrer. Ensuite, nous sommes allés au Strongroom Studio à Londres, qui est vraiment cool. Nous avons enregistré nos parties séparément. Vous imaginez un groupe tous ensemble en studio, mais nous n'avons pas fait ça. Nous avons fait de la batterie pendant trois jours, des guitares pendant quatre jours, de la basse pendant deux jours...
Sam : De la basse pendant un jour !
Kieran : Oh désolé.
Sam, tu avais donc la pression aussi…
Sam : Oui, le truc c'est que j'aime la pression aussi !
Kieran : C'était une journée assez amusante. Tu sais, enregistrer ces jours-ci est assez facile. Il y a tellement de matériel, de technologies, il n'y a pas de cassettes, alors vous pouvez faire seize prises et prendre celle que vous voulez. Pour les musiciens, c'est probablement mieux maintenant que dans les années 60.
Pensez-vous réellement que le monde est soit noir, soit blanc, soit triste, soit heureux ?
Kieran : C'est tout le contraire ! Je vois tout ce qu'il y a entre les deux, je le vois gris. L’idée de Sad Happy, c'est que tout se passe en même temps. Quand vous êtes dans un groupe et en tournée, vous êtes les hommes les plus heureux de tous les temps parce que vous jouez devant des milliers de personnes. Mais ensuite, vous allez dans votre chambre d'hôtel et vous êtes tout seul, vous vous sentez si triste. Et puis vous devez voyager pendant quinze heures... Ce n'est pas comme si c'était terrible, mais vos émotions sont partout. C'est comme une injection massive de dopamine quand vous êtes sur scène. C'est un équilibre bizarre et il faut s'habituer à être sur la route. Je pense donc que l'album Sad Happy traite de la gestion de ces deux émotions qui sont toujours en opposition.
Le film Joker a-t-il influencé votre musique ?
Kieran : On nous le demande tout le temps !
Sam : Oui, on en a parlé, on a eu cette idée et puis le film est sorti et on s'est dit "Oh putain". Nous n'allions pas changer notre concept juste parce que le film est sorti.
Kieran : C'était vraiment le meilleur film de l’année en plus.
Sam : Et Dieu merci pour ça ! En fait, c'est frustrant quand on a une idée et qu'on y est attaché. C'est vraiment difficile de la laisser partir et nous ne l'avons pas fait.
Que peut-on attendre de la deuxième partie de l'album, ce ne seront que des chansons tristes ?
Kieran : Ça va être un peu plus triste. Mais en général, il y a beaucoup de chansons motivantes. Il y a "Wake Up Call" qui est très atmosphérique mais tous les albums sonnent comme du Circa Waves. Les paroles changent un peu. La deuxième moitié est juste un peu plus... triste.
Alors pourquoi n'avez-vous pas choisi d'enregistrer un double album ?
Sam : C'est vraiment difficile d'écrire un double album ! C'est deux fois plus de chansons.
Kieran : C'est exactement pour cette raison ! Pourquoi faire un double album quand vous pouvez le faire en deux parties ? Haha
Pensez-vous avoir été influencés par d'autres groupes ou d'autres choses musicalement pour cet album ?
Kieran : Oui, je voulais vraiment ramener des guitares fortes, comme nous l'avions fait pour notre premier album. Nous devions trouver quel était le son de Circa Waves. Nous nous en sommes débarrassés pour le deuxième et le troisième album et ça m’a manqué. Ce disque apporte donc quelques familiarités avec le premier. Mais ensuite, nous avons muri concernant le son de la batterie. Il y a beaucoup plus de synthés et d'influences électroniques. Gorrillaz ont eu une grande influence.
Sam : Tame Impala aussi.
Kieran : Mais j'écoute de la musique pop, j'aime The Weeknd, ses sons de batterie sont incroyables. Même Drake.
Du coup, que pensez-vous du nouvel album de Tame Impala ?
Sam : Je n'ai pas eu le temps de l'écouter...
Kieran : Je n'ai entendu que les cinq premières chansons. Mais je pense que c'est comme un album, tout se fond en un. Je pense qu'il est étonnant et qu'il se développe toujours.
Crédits photo : Florentine Pautet
Pensez-vous qu'il est plus difficile aujourd'hui d'être dans un groupe de rock ?
Kieran : Oui, je pense qu'il y a moins de demande pour la musique rock que lorsque nous étions plus jeunes. Avant, les festivals étaient réservés aux groupes de rock et maintenant il y a beaucoup de pop. L'espace pour nous est réduit.
Sam : Je pense que les groupes de rock doivent se développer, il ne suffit plus d'être quatre mecs à faire du rock de nos jours. Mais c'est une bonne chose, le rock a toujours été un genre assez conservateur. C'est cool aujourd'hui d'être dans une position plus progressiste.
Certains groupes comme Bring Me The Horizon ont vraiment évolué au fil des années. Pensez-vous que vous pourriez suivre leur voie en faisant évoluer votre musique ?
Kieran : Je pense que nous avons déjà évolué. Nos premiers disques sonnaient plus comme du rock garage. Maintenant, nous sommes un peu plus pop. Nous aimons nous pousser à produire le meilleur son possible. Nous voulons nous connecter avec des gens qui aiment la musique pop. Si ma tante aime ça, ce sera cool parce qu'elle aime la pop.
Si vous deviez écrire un album concept, de quoi s'agirait-il ?
Kieran : Ce serait une bande son imaginaire pour un livre.
Sam : Il y a ce livre qui s'appelle "If on a winter’s night traveler" qui est tellement fou. Imaginer la bande son pendant la lecture de ce livre est fascinant. J'aimerais faire un space opera.
Kieran : Hahahaha. Ce serait un space opéra à l'ancienne des années soixante-dix / progressif.
Quelle sera votre actualité après cet album ?
Kieran : Probablement une tournée européenne, il suffit de rassembler toutes les dates. Elle sera annoncée très bientôt.
Sam : Et puis nous allons écrire ce double album concept.
Kieran : Il s'agit d'un space opera qui n'existe pas ! Mais nous serons de retour à Paris cette année.
Interview et photos : Florentine Pautet