C'est une soirée 100% mancunienne au parfum de nostalgie qui se prépare à la Villette. Liam Gallagher, icône de la brit-pop et du rock des années 1990 avec Oasis, vient présenter ses titres solo … mais pas que. Son dernier opus Why Me? Why Not n'est dans les bacs que depuis 2019, mais l'artiste imprévisible à l'insolence légendaire a sorti récemment un EP live, Acoustic Sessions, qui donne la part belle aux titres d'Oasis, énième pied de nez à son frère ennemi Noel. Liam Gallagher achève en France ce soir une vaste tournée européenne, souvent à guichet fermé, où titres du passé et du présent se mêlent pour le plus grand bonheur du public. C'est le groupe Twisted Wheel, également originaire de Manchester, qui est chargé d'ouvrir la soirée placée sous le signe du rock'n'roll et de l'impertinence.
Twisted Wheel
Le quatuor qui s'installe sur scène pour ouvrir la soirée, Twisted Wheel, est une formation originaire de Manchester, au parcours déjà singulier, puisque le groupe a connu une belle ascension avec deux premiers albums très indie rock, avant de se séparer en 2014. Fraîchement reformé, le groupe a sorti un EP, prépare son nouvel opus (Satisfying the Ritual, dont la sortie est prévue en mars prochain), et se retrouve invité par Liam Gallagher sur sa tournée. Il faut dire que Twisted Wheel n'en est pas à sa première scène avec la famille Gallagher : ils ont en effet assuré plusieurs premières parties d'Oasis en 2009 et ont ouvert pour l'énorme concert de Liam à Old Trafford à Manchester en 2018, devant un modeste parterre de 50 000 personnes !
Twisted Wheel propose un rock bondissant et vitaminé purement british, avec des titres énergiques et groovy qui semblent obtenir l'adhésion du public de la fosse du Zénith, déjà nombreux ce soir. Les compositions sont efficaces et les refrans très dansants, sans être d'une originalité exceptionnelle. Quelques titres sortent du lot, comme le très chaloupé "Ghost Man", où les petits effets twistés des guitares accompagnent un refrain entraînant aux harmonies aigües. Citons également la ballade sympathique "DNA" ou le très punk "You Stole the Sun", rapide et incisif, théatre d'un fou rire général puisque le vocaliste Jonny Brown s'emmêle dans les paroles et pousse quelques jurons, avant de repartir de plus belle. Une corde cassée sera remplacée en plein titre, bref la rock'n'roll attitude est bien là.
L'attitude de Twisted Wheel, c'est aussi une allure juvénile, un chanteur à la coupe de cheveux improbable, une avalanche de "fuck" dans les quelques phrases d'échange avec le public, marquées par un accent mancunien très prononcé... Bien évidemment, toute ressemblance avec des groupes britanniques existant ou ayant existé est tout à fait fortuite. Parlons plutôt d'un hommage !
Le vocaliste semble toutefois perturbé par des problèmes de son, chose qui ne s'entend pas trop dans la fosse. On distingue plutôt bien chaque instrument, et la voix, mais le retour son de Jonny Brown a l'air insuffisant. Peut-être ce dernier a-t-il du mal à s'adapter à l'acoustique discutable du Zénith ? Des techniciens interviennent, appelés plusieurs fois, sans se douter que les ennuis ne font que commencer pour eux. Spoiler : l'ingé-son et les techniciens son seront probablement les seules personnes du Zénith à passer un très mauvais moment. C'est ce que va prouver la suite de la soirée avec celui que tout le monde attend, Liam Gallagher.
Setlist Twisted Wheel
- Nomad Hat
- She's a Weapon
- Ghost Man
- Black and Blue
- DNA
- You Stole the Sun
- We Are Us
Liam Gallagher
Le Zénith, complet, s'agite sérieusement lorsque résonnent l'hymne de Manchester et "Fuckin' In the Bushes", pendant lesquels les nombreux musiciens investissent la scène. Un immense écran diffuse le clip du récent morceau "Shockwave", et la folie s'empare de la salle à l'arrivée du héros de la soirée.
La barbe longue, chaudement vêtu comme à l'accoutumée (ce soir l'anorak est blanc et oversize), tenant maracas et tambourin à la main, et sans aucun mot d'introduction, Liam Gallagher vient se camper devant le micro, avec sa position corporelle si caractéristique, pour entamer sans attendre l'un des premiers succès d'Oasis, "Rock'n'Roll Star", repris immédiatement par le public - dont les cordes vocales vont d'ailleurs être très sollicitées toute la soirée.
Pas de doute, le personnage n'a pas changé. Liam, gêné par un problème technique, s'énerve, fait de grands gestes et lance des regards meurtiers vers l'ingé-son qui est sur le côté de la scène. Le cadet des Gallagher ferait-il sa rock'n'roll star ? Pas vraiment, car on sent bien que le son est assez brouillon. L'air furieux, il poursuit néanmoins en enchaînant quatre titres solo sur lesquels il ne cessera de gesticuler en faisant signe qu'il s'entend mal. Il faut souligner que le groupe assure vraiment, avec plusieurs guitaristes, un batteur et trois choristes venant soutenir Liam dans les refrains de "Halo" où il semble à la peine dans les aigus.
La première partie du set, avec les chansons solo de Liam Gallagher, est assez inégale, en raison des problèmes techniques notamment, mais l'artiste peut compter sur son public pour entonner les paroles avec lui, notamment sur le groovy "Shockwave" ou sur l'hymne "For What It's Worth". Acclamé par la foule, le vocaliste continue de piquer sa crise en jetant ses maracas sur le sol et en invectivant le malheureux ingé-son. On ne sait sur quel pied danser avec Liam, entre arrogance et honnêteté, entre suffisance et générosité. Il se fait prier entre chaque titre mais est bel et bien venu offrir au public parisien ce qu'il attend : des tubes. Un concert d'Oasis. Le meilleur des Gallagher, même sans frangin.
Au retour dans la setlist de titres mythiques d'Oasis, la fosse se met à sauter comme un seul homme. C'est "Morning Glory" qui résonne, où Liam se met un moment en retrait, posté sur un cube géant marqué de l'inscription "Rock'n'Roll", laissant le devant de la scène à ses talentueux musiciens. Le public se déchaîne et chante à tue-tête "Columbia" et surtout l'énorme tube "Stand by Me", moment d'émotions où les torches des téléphones dansent dans tout le Zenith. Le son d'ensemble est très correct mais saturé, et le problème de retour son n'est toujours pas réglé, au grand dam des techniciens qui se font toujours enguirlander par Liam Gallagher pendant les morceaux. Ce dernier adressera tout de même des remerciements chaleureux qu public pour son engagement et ses vocalises.
Notons la présence sur scène de Paul Arthurs, alias Bonehead (guitariste fondateur d'Oasis qui avait quitté le groupe en 1999) qui joue ce soir sur tous les titres d'Oasis, et qui reste sur scène pour accompagner Liam à la guitare acoustique pour la très belle ballade "Once", dernier single de Why Me ? Why Not. Pour l'anecdote, c'est notre Eric Cantona national qui joue le Roi dans l'excellent clip de ce morceau, où Liam campe un majordome.
À la guitare nous reconnaissons aussi Jay Mehler (ex-Kasabian), aux côtés de Liam depuis le groupe Beady Eye (boudé par Liam dans la setlist puisqu'aucun morceau du groupe, séparé depuis 2014, n'apparaît ce soir)
La setlist, idéale ce soir, fait une synthèse entre les morceaux personnels et les tubes d'Oasis, la part belle étant donnée aux titres de la formation dissoute en 2009 non loin d'ici. La fin du show va combler les attentes des plus nostalgiques des fans : les problèmes de son (partiellement) réglés, Liam Gallagher va s'ouvrir davantage et interagir avec le public pour le combo de huit morceaux d'Oasis.
"Gas Panic !" (2000) est dédicacée aux plus anciens des fans (baptisés "old fuckers") puis la foule reprend à l'unisson le tube "Live Forever". Un premier départ, et la troupe revient rapidement tandis que Liam charge le public d'assurer au chant sur le morceau suivant avec un karaoké géant. Il s'agit d'un autre titre de légende, "Acquiesce", sur lequel le Zénith se charge des parties anciennement chantées par Noel. L'ambiance est euphorique, les voix des spectateurs emplissant la salle, tandis que le cadet des Gallagher applaudit la foule en jouant tranquillement des maracas.
Les hits s'enchaînent à un rythme effréné, le public saute et explose de joie sur "Roll With It" et "Supersonic", et même si Liam joue encore la colère en débranchant son micro, plus personne n'y croit. Il fait d'ailleurs applaudir ses musiciens, qui ont été assez souvent mis en avant dans le show. Seul avec le batteur et un clavier, éclairé par des lumières jaunes, il achève cette partie du set avec une version revisitée de "Champagne Supernova", moment de grâce avant un second départ.
Taquin, Liam Gallagher revient sous les applaudissements et propose au public du Zénith de donner son avis pour le dernier morceau, en choisissant entre l'ultra tube "Wonderwall" et le sulfureux "Cigarettes & Alcohol". En réalité, les deux morceaux seront joués, pour un ultime moment de communion entre la star et son public fidèle, acquis à sa cause depuis vingt-cinq ans déjà.
Il y avait pas mal d'Anglais dans la salle, mais ce soir les "rosbifs" et les "froggies" ont trouvé un terrain d'entente, en chantant à tue-tête et en acclamant la rock'n'roll star qui a délivré un show convaincant en comblant toutes les attentes. Le public repart l'air ravi, même si certains restent un peu sur leur faim et auraient aimé entendre un autre de leurs morceaux préférés.
Setlist Liam Gallagher :
Intro : Manchester City Champion Chant + Fuckin' in the Bushes
1. Rock'n'Roll Star
2. Halo
3. Shockwave
4.Wall of Glass
5. Be Still
6. For What It's Worth
7. Morning Glory
8. Columbia
9. Stand by Me
10. Once
11. The River
12. Gas Panic !
13. Live Forever
14. Acquiesce
15. Roll With It
16. Supersonic
17. Champagne Supernova
18. Wonderwall
19. Cigarettes & Alcohol
Photographies : ©Lionel/Born666. Toute reproduction est interdite sans l'autorisation du photographe.