En 25 ans de carrière et huit albums studios, le groupe écossais est devenu une formation reconnue de la scène britannique. Le nouvel opus, résolument politique, se veut une synthèse de l’ensemble de la carrière du trio. Résultat efficace ou choix de la facilité ?
Avec un quart de siècle d’existence, Biffy Clyro a eu le temps d’explorer des styles très différents sur ses albums, du post-hardcore et du rock expérimental et jouissivement bruitiste à ses débuts, des hymnes stadium rock puissants à partir de Puzzle, qui sur Only Revolutions regagnent en éclectisme et en agressivité, des expérimentations stylistiques folles sur Opposites ; le groupe s’est même essayé à l’album médiocre avec Ellipsis.
La bande originale composée par le trio, Balance, Not Symmetry, semblait montrer que les Ecossais étaient prêts à repartir vers des morceaux moins fades et avec plus de recherche, d’autant qu’ils avaient déclaré à plusieurs reprises que ce Celebration Of Endings serait leur album le plus heavy.
Le premier single révélé, « Instant History », est pourtant le plus pop jamais composé par le groupe, avec ses arrangements cliché au possible d’electro-pop commercial qui se plaquent sur une mélodie typique du groupe d’Aberdeen, donc sans réelle surprise. A la première écoute de l’albumm, on se rend pourtant compte que ce single n’est pas du tout représentatif de Celebration Of Endings, Biffy Clyro avouant l’avoir choisi comme single justement pour déstabiliser.
Si ce constat a de quoi rassurer les fans, il s’accompagne de la sensation que le groupe est au minimum syndical sur ce disque : certes, les guitares sont de sortie, il y a plus de dynamisme que dans les précédents, et certains fans seront ravis de retrouver du Biffy classique, mais cela n’a pas l’énergie des premiers disques et manque d’originalité. Les personnes réfractaires au style du groupe et à ses gimmicks passeront leur chemin avant la première moitié, les fans qui désirent se retrouver en terrain connu seront comblés, ceux qui souhaitaient de nouvelles folies seront déçus.
A écouter de plus près, cette affirmation est cependant à nuancer. Au fur et à mesure, Celebration Of Endings dévoile ses atouts : pour ceux qui appréciaient déjà la musique des Ecossais, il faut bien avouer qu’ils n’ont rien perdu de leur talent en matière de mélodies outrageusement accrocheuses, de gros riffs lourds, et d’équilibre global entre des instruments dont les influences metal continuent, même à un degré moindre, de se faire sentir, et une sensibilité pop qui passe entre autres par des chœurs et des gimmick vocaux qui s’infiltrent fatalement dans les mémoires – « Tiny Indoor Firework » est un exemple assez représentatif de morceau addictif presque malgré soi, à la composante pop très prononcée. « Space » et « Opaque » sont des modèles de ballades qui n’apportent rien de neuf à la scène musicale, mais comportent des éléments indéfinissables qui font que le risque de finir par les chanter à tue-tête est extrêmement élevé.
Le groupe reprend des ingrédients caractéristiques de sa musique, les riffs, les harmonies vocales entre le chanteur – guitariste Simon Neil et les jumeaux James Johnston à la basse et Ben à la batterie, et réussit sur plusieurs morceaux à y apporter des éléments presque imperceptibles qui rendent l’ensemble plus original, que ce soit un rythme syncopé, des harmonies aigues poussées dans leurs retranchements ou des arrangements légèrement inattendus. Le travail sur le son du réalisateur Richard Costey est ici nettement plus intéressant que sur Ellipsis. L’ennui, c’est que le groupe a tendance à cantonner ces éléments aux couplets, pour revenir ensuite à des refrains plus faciles mais indéniablement efficaces : c’est notable entre autres sur « The Champ », « Weird Leisure » ou « End of ».
S’il a plus d’énergie qu’Ellipsis, ce qui est en accord avec un propos profondément social, qui exprime « la colère envers le monde », comme nous l’expliquait Ben Johnston, Celebration Of Endings n’a pas la gnaque des autres albums, il n’a pas cette expérimentation agressive qu’avait Vertigo Of Bliss, ni les hymnes fédérateurs d’Only Revolutions, encore moins l’ambition presque cinématographique d’Opposites. Alors que l’album, à commencer par le titre, évoque les changements et le fait de l’aborder sous un angle positif, il ne met pas assez cette idée en pratique. Il emprunte un peu à tous ses prédécesseurs, il est vrai, mais sans réussir à les transcender pour créer de titres véritablement hors du commun, à de rares exceptions près.
Ainsi le titre le plus marquant et le plus expérimental est sans conteste le tout dernier, « Cop Syrup » : on y retrouve les cris caractéristiques du début qui dialoguent avec des paroles presque parlées et des envolées vocales, le tout dans une alternance d’un long passage expérimental et d’explosions électriques scandées, hachées, pour un résultat déroutant. Le plus grand regret de cet album, bon et affreusement accrocheur mais dans l’absolu pas indispensable, est de ne pas avoir plus creusé ce sillon : onze morceaux de ce niveau auraient formé l’un des albums majeurs de Biffy Clyro.
Tracklist North Of No South The Champ Weird Leisure Tiny Indoor Fireworks Worst Type Of Best Possible Space End Of Instant History The Pink Limit Opaque Cop Syrup Sortie le 14 août chez Warner |
Crédit photos : Ash Roberts