The Pineapple Thief – Versions of the Truth

Depuis l’intégration de Gavin Harrison à la batterie et la sortie de Your Wilderness en 2016, The Pineapple Thief connaît une seconde partie de carrière à l’ascension fulgurante. Ayant désormais acquis une reconnaissance plus que méritée au sein de la scène progressive, Bruce Soord et ses compères continuent leur rythme de croisière à raison d’une sortie tous les deux ans. Dissolution avait la lourde tâche de succéder à Your Wilderness et en dépit de qualités intrinsèques évidentes souffrait tout de même de la comparaison avec son prédécesseur. Versions of the Truth échappe à cette comparaison et si le quatuor semble en apparence toujours aller vers plus de simplicité, il se dégage de cet album une maîtrise et une recherche de la mélodie juste et touchante.

Ecrit deux ans avant sa sortie, en plein débat sur le Brexit, qui a semble-t-il affecté Bruce Soord, les thématiques d’un titre comme Versions of the Truth résonnent de façon particulière à l’heure actuelle. Pourtant musicalement, c’est un titre à l’ambiance délicate et aux harmonies vocales subtiles qui introduit l’album, sur fond d’apparente simplicité rythmique de la part de Gavin Harrison. Moins démonstratif que sur les albums précédents (malgré un jeu toujours subtil sur les toms et cymbales notamment sur « Break it all », le premier couplet de « Leave Me Be » ou encore le titre éponyme), l’ex-batteur de Porcupine Tree se met d’ailleurs toujours au service de la musique sur ces dix compositions (« Out of Line »).

Malgré un « Break it all » plus rock et qui tranche avec « Versions of the Truth » et « Demons » (tous les trois choisis en single), les titres semblent aller vers des mélodies assimilables aisément et des lignes vocales qui font mouche tout en restant recherchées (« Demons », « Versions of the Truth », « The Game »). Ces mélodies se développent sur des titres qui lorgnent parfois vers le post-rock (la seconde partie éthérée de « Demons », les dépouillés « Driving Like Maniacs », « The Game » ou « Too Many Voices »), l’électro (qui a toujours été plus ou moins présent chez The Pineapple Thief), le rock plus catchy (« Break it All », « Leave Me Be »). On songe même à Peter Gabriel sur le délicat « Stop Making Sense ». En résulte un album non linéaire et diversifié, dans la lignée d’un All the Wars ou Dissolution.
Le grand gagnant de l’album n’est autre que Bruce Soord lui-même qui exprime toutes ses émotions et sa mélancolie à travers une approche vocale intimiste, parfois à fleur de peau (« Demons », « Our Mire », « Versions of the Truth » ou encore le déchirant « We Had the Key to Survive » sur « Out of Line »). S’il reconnait lui-même avoir pris des cours de chant il y a quelques années, sa voix apparait d’une extrême sensibilité, comme sur la partie finale de « Our Mire », probablement plus posée et avec des harmonies vocales particulièrement travaillées (« The Game », « Out of Line »).


A l’exception des titres les plus rock, auparavant mentionnés, le travail sur les guitares (et renforcé par les claviers de Steve Kitch), évoquent plus des soundscapes typiques du post-rock que le riffing parfois proche des albums les plus musclés de Porcupine Tree que le groupe mettait en avant sur Your Wilderness. Ponctuellement, des soli de guitare cristallins viennent interrompre les mélodies susurrées par Soord (« Out of Line » à 1 :00 et 3 :00). Sur Versions of the Truth, Bruce Soord ne s’est pas obligé à composer de morceau fleuve, voie que le quatuor britannique a par ailleurs explorée à maintes reprises dans le passé. Privilégiant des titres courts et efficaces, magnifiés par une production parfaite, on sent que le leader s’est attaché à proposer un condensé d’émotion sur chaque composition.

Le seul défaut de cet album résulte finalement dans une direction artistique parfois plurielle. Si l’on reconnait toujours la patte de The Pineapple Thief, la diversité des émotions dégagée et des ambiances proposées par le quatuor renvoie à une ligne directrice difficile à cerner au cours des premières écoutes, malgré une apparente cohésion des titres entre eux.

Mais qu’importe, la qualité est une fois de plus au rendez-vous. The Pineapple Thief propose dix titres intelligemment composés, qui raviront les amateurs de ce rock progressif en apparence simple, sans prétention mais où l’émotion est toujours à fleur de peau.

Tracklist :

Versions of the Truth
Break it All
Demons
Driving Like Maniacs
Leave Me Be
Too Many Voices
Our Mire
Out of Line
Stop Making Sense
The Game

Sortie le 4 septembre 2020 chez KScope
Photographie : © Diana Seifert 2020

NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



Partagez cet article sur vos réseaux sociaux :

Ces articles en relation peuvent aussi vous intéresser...

Ces artistes en relation peuvent aussi vous intéresser...