Lucidvox, ce sont quatre Moscovites pleines d'énergie qui mêlent savamment le folklore et le moderne, entre chorale improvisée et effets de pédale électronique.
We are (мы еÑÑ‚ÑŒ) est leur troisième album, dont les neuf titres chantés principalement en russe sont traduits en anglais. En résulte un court album (42 minutes) comme une plongée dans un univers semi-inconnu, la découverte d'un versant inexploré d'une contrée familière. Entre chamanisme et psyché, les sonorités rock sont nimbées d'une aura mystérieuse, voire mystique, qui donne l'impression de pouvoir transcender l'auditeur, même à coups de synthé en boucle.
"My little Star" ouvre l'album avec une voix qui résonne, seule, se répercute dans l'espace, comme un chant liturgique, une incantation. Elle appelle, désespérée, sa mère disparue. Lui répond sans doute le dieu du rock en personne, qui la console avec ses riffs de guitare électrique, les chœurs féminins en arrière-plan qui s'éveillent, avec une prise de chant comme pour accomplir un rituel.
La manière de scander les messages se rapproche de feu Zemfira, autre groupe à voix féminine, sur "Knife", qui a fait l'objet du clip tempêtueux qui nous a fait connaître Lucidvox.
Les voix, les saturations, tout concourt à donner l'impression qu'on nous martelle le crâne avec des petites claques. C'est pour faire circuler le sang, dit-on.
Même si certains rythmes de batterie peuvent paraître assez répétitifs, la manière de scander les textes sur ces mélodies en boucle entraîne l'auditeur dans un tourbillon mystique, et c'est sans doute l'effet recherché. La voix d'Alina se fait tout à tour litanique ("Around") et enchaîne les phrases presque sans respirer, ou vaporeuse, comme sur "Runaway" où elle se confond presque avec la musique, où elle n'est plus qu'un souffle du vent qui nous parlerait directement.
On reconnaît le synthé versant dans le pop cher à des groupes comme Motorama sur "You are", avec ses airs alanguis tirés des années 80, quand on avait des nylons multicolores en guise de vêtements.
Les quatre musiciennes racontent que Lucidvox est leur premier groupe, que certaines n'avaient jamais joué d'instrument avant de le fonder. Anna, la bassiste, explique : "La raison pour laquelle nous avons appelé notre album We Are est que maintenant nous sentons que nous pouvons être nous-mêmes. Très fortes. Tant dans nos personnalités que dans le groupe." Un début qui mérite de s'affirmer en effet.
L'album sort sur le label Glitterbeat le 23 octobre 2020.