Les luxembourgeois de Mutiny on the Bounty ont sorti leur deuxième album le 8 octobre dernier et frappent un grand coup dans cette scène si particulière qui se développe, à la croisée du post-rock et de groupes comme Isis et Mastodon. Il est particulièrement ardu de décrire la musique du quatuor, qui emprunte autant à la complexité du math-rock qu’à la folie d’At The Drive-in, pour un résultat franchement barré. L’instrumental « North Korea » reste encore à peu près dans les clous avec ses riffs très matheux et de grandes embardées de guitares en fusion, furibardes et épiques. Une magnifique réussite. Mais dès qu’arrive la voix de Sacha Schmitz (batteur et chanteur principal) sur les couplets, les musiciens se lancent à corps perdu dans des délires barrés et très techniques où l’énergie prime jusqu’à ce que tous s’accordent de nouveau pour parvenir à forger un refrain qui retrouve une mélodie et une puissance impressionnantes.
Les garçons savent également ralentir (un peu) la cadence quand ils le souhaitent et montrer au passage qu’ils maîtrisent les arcanes nécessaires à la composition d’une chanson mélodique. Attention cela dit, « Candies » permet au chanteur de montrer ses capacités, mais n’a rien d’un slow romantique. Il est en revanche clair à ce stade que l’émotion reste le point d’orgue dans cette débauche d’énergie, ce que confirme l’intermède « Shadow Figures ». C’est en ce sens qu’on peut rapprocher Mutiny on the Bounty de combos comme These Arms are Snakes ou Russian Circles, soit une scène qui cherche, qui se cherche et que l’on ne sait pas encore vraiment décrire. Est-ce vraiment nécessaire d’ailleurs ? L’essentiel est de voir des groupes qui osent sortir des sentiers battus et nous proposent des compositions chargées d’adrénaline à haute teneur émotionnelle.
Le groupe est particulièrement habile pour nous balancer des instrumentaux nerveux et parlants. Cette liberté affichée par les musiciens, qui enchaînent intermèdes, titres chantés et instrumentaux, est tout à leur honneur et fort appréciable à l’écoute. Après, tout ça n’est pas encore complètement maîtrisé, la fougue de la jeunesse prévalant aujourd’hui sur le reste. C’est le seul bémol qu’on peut formuler à l’encontre d’un album qui gagnerait parfois à aller droit au but, ou à complexifier plus franchement pour éviter d’aboutir à un résultat trop touffu, comme sur les deux dernières pistes, 6 minutes chacune, qui voient le groupe prendre le temps d’exploiter ses différents thèmes et idées. Mais ça, ce sera pour une prochaine fois.
En l’état, le groupe a largement réussi son pari et a tiré le maximum de sa collaboration avec le producteur Matt Bayles qui avait complètement craqué sur leur son. Mutiny on the Bounty a désormais acquis un très gros niveau qui devrait lui permettre, si la tournée se passe bien, d’inscrire son nom pour de bon parmi les leaders de cette scène encore émergente qui fait de plus en parler d’elle. C’est là tout le mal qu’on souhaite à cette formation qui a le potentiel pour progresser encore bien davantage dans les mois et années à venir pour nous proposer un 3e album que l’on espère tonitruant.
Ma note : 7,5/10